Anne Verdier

Exposition du 7 septembre au 8 octobre 2013

Vernissage le samedi 7 septembre de 18h30 à 21h.
Conférence de l’artiste le samedi 7 septembre à 17h : présentation du travail et de la démarche artistique.
Ouverture tous les jours de 11h à 19h jusqu’au 29 septembre et de 14h à 18h à parti du 30 septembre..

Assis sans intention, ni rien à faire,
le printemps vient, l’herbe pousse d’elle même.
(extrait de zenrin kushu

Anne Verdier sculpte la terre cuite.
Oubliant la théorie, Anne accumule les matières, les expériences … elle accumule, cuit, fait fondre et puis elle casse… pour voir !… pour montrer l’exubérance.
Casser chez elle n’est pas détruire, mais au contraire à cet instant, le marteau redevient outil de sculpture et alors commence, au moment où d’autres pensent que tout est fini, un travail finalement si classique de dégrossissement : révéler les tensions, trouver les lignes … vivre les formes.
Elle se positionne dans une attitude sans ambigüité. Il n’y est plus question de savoir faire mais simplement d’être présent, face et dans la sculpture en même temps, physiquement… Il faut surtout ne rien attendre et savourer ce qui arrive. Systématiquement, elle ne cherche qu’à mettre en oeuvre des processus qui permettront d’improbables résultats …
Le four est le lieu de l’expérimentation, le vase de tous les possibles : là où les matières se mêlent, là où les magmas rentrent en intime fusion ; ils ne se laisseront voir qu’après leur mise au jour … rien n’est vraiment voulu, tout s’arrange d’un ultime chaos … Anne le regarde… et décide à peine !
Elle refuse de respecter les outils pour la valeur sacrée qu’ils auraient, mais humblement, les met en jeux, au risque même de les voir disparaître, pour leur permettre d’inventer. Aucune composition n’apparaît lors de l’enfournement, la cuisson ne sert qu’à la sublimation des matières … pourtant, enfourner est aussi fabriquer et loin du hasard, tout ici converge vers la surprise. Il s’agit certainement de se préparer : la cuisson fait partie des prémices ! elle est le temps où tout devient inéluctable, où tout se mélange dans une curieuse impression organique alors que dans le creuset, le monde est minéral.
Puis une fois le four refroidi, elle en ouvre la porte et sans perdre de temps termine l’ouvrage, reprend les outils, essaye, rature, casse et recolle, enlève, divise … comme si tout pouvait servir à fonder l’utopie d’une forme qui n’en serait pas … l’attitude alors, et seulement alors, devient sculpture …
La forme est pleine, entière, sans peau vraiment. Son épiderme n’est que la partie visible de ses entrailles, tout y apparaît à égalité : le sous-cuit et le sur-cuit , la sculpture et son socle … car souvent on devine la sole, comme témoin, arrachée au ventre qui la fit naître …
De deux mots, elle me parle d’un univers baveux : d’un univers qui fut liquide mais que l’on sait figé sous sa gangue, qu’elle casse avec toute la frénésie des orpailleurs. Puis, elle regarde enfin, cherchant à comprendre les transformations, pour qu’elles puissent à nouveau servir d’autres hypothèses…

Philippe Godderidge, décembre 2010

Anne Verdier : techniques et démarche

Mon travail est fait d’accumulation de matières archaïques. Le céladon et autres émaux traditionnels rencontrent  une terre de basse température, des grès et porcelaine ainsi que des tuiles, briques et autres éléments déjà cuits. La structure de ces amalgames provient de la nature des processus mis en œuvre. C’est cet aspect que j’ai voulu souligner en choisissant ce titre « et des ratons laveurs » en hommage au poème Inventaire de Prévert.
100 m², presque la surface de la grange à coté de l’atelier… je décide de travailler sur l’angle, ce point de rencontre entre le mur en pierre et la dalle en béton. J’estampe, au pied du mur une porcelaine, un grès noir ou brut de Tournon St Martin et je remplis avec des matières fusibles.
L’architecte a voulu ce centre céramique comme un lieu expérimental, un peu comme l’atelier avec ses fours que l’on aperçoit à travers les baies vitrées. Les fragments cuits de cette ligne qui s’est déployée dans ma grange, s’organisent au sol, de nouvelles propositions apparaissent entre ces volumes, l’espace et nous.
Ces sculptures sont accompagnées d’une recherche de motifs sur papier blanc. A partir des mêmes recettes de matières premières, j’ai utilisé un autre procédé pour générer des compositions aléatoires. A l’aide de codages informatiques, la chimie d’un émail avec sa concentration en silice, alumine, chaux etc est  transformée en motif à l’écran. C’est à partir de ce motif de point binaire que j’ai gaufré un papier blanc (format 33cmx33cm). Est-ce que des procédés aussi différents peuvent interagir dans un même lieu? Existe-t-il une proximité entre les céramiques et ces papiers gaufrés?