28.11 – 3.01

LE GESTE SUR PIED
Lucien Petit (ACLB)

Lucien Petit est sculpteur. Son métier partage avec l’architecte l’ambition de construire, faisant sortir du sol des formes hospitalières. Les siennes se dressent sans répondre à aucun programme. Elles tiennent, empruntant parfois leurs contours à l’habitat, aussi rustique soit-il. Alors elles abritent un souffle. À chaque fois, une idée trouve refuge dans un volume, se loge à l’intérieur. Des statures bien bâties offrent l’asile. Temple, toute œuvre sert de réceptacle tangible pour contenir ce qui ne l’est pas. L’artiste fige une enveloppe pour mieux héberger le mouvant. Silhouettes austères et surfaces rugueuses affirment l’autorité de la stabilité, ancrée avec aplomb sur un plan dont elle conforte les perpendiculaires. Sur le promontoire de l’ostentation, des verticales paradent humblement, debout. Leur robustesse témoigne d’une nécessaire rigueur.

 

Lucien Petit est sculpteur. Son parcours témoigne d’une familiarité avec la céramique, dont il travaille le potentiel technique et plastique, autant qu’il en embrasse la philosophie. C’est bien-sûr le feu qui donnera toujours la dernière touche à ses pièces, que lui-même ne façonne pas forcément de ses mains seules. L’usage de gabarits permet d’obtenir des objets sans modeler directement la terre. Contrairement à l’utilisation du moule, une empreinte charnelle demeure. L’aspect manufacturé doit trouver sa juste mesure, pour maintenir l’état de la matière entre réflexion et spontanéité. Il faut s’autoriser à tâtonner, quitte à arrimer ses doutes. Formé à la porcelaine industrielle, l’artiste expérimenta diverses argiles selon le vaste éventail de leur traitement, pour aujourd’hui façonner principalement du grès dans son atelier installé dans les environs de La Borne, où il procède à des cuissons à bois. Depuis la motte malléable posée devant lui, jusqu’à la sortie du four, transpire une indéniable adresse.

 

Lucien Petit est sculpteur. Son vocabulaire réveille la modernité des maîtres du siècle passé. Une géométrie dicte le tracé de ses allures, nourries par la radicalité des avants-gardes autant que par la violence du brutalisme. Et à l’image de ces références récentes, il s’agit de creuser plus profond encore pour frôler les lignes irréductibles de cultures ancestrales. La solennité de ses figures résonne avec certains cultes séculaires, dont les rituels millimétrés imposent d’impeccables agencements. Un pareil cérémonial guide l’organisation de ses œuvres dans l’espace. Ainsi elles peuvent surgir par familles, qui paraissent bouger lorsque nous nous déplaçons autour d’elles, petites, moyennes et grandes semblant changer de taille selon le jeu de notre circulation. Cette stratégie cinétique dans l’ordonnancement des choses se doit d’être orchestrée avec fermeté.

 

Lucien Petit est sculpteur. Sa sensibilité s’est forgée au contact d’une lignée de personnalités, qu’elles aient orienté sa propre démarche ou bénéficié de son expertise, sans contradiction. Car c’est bien dans les deux sens que cela fonctionne, et la biographie de l’artiste nous fait percevoir l’éminence de la transmission des savoirs, par l’expérience. Il les reçoit. Il les donne. L’humanité partout est flagrante, incarnée dans des compagnonnages calibrés par le travail, parfois renforcés par l’amitié. Cheminant au fil des rencontres, les conversations se cultivent. Certaines seront indélébiles. Un intérêt pour le temps minéral, qui s’étale dans la durée hors de l’échelle personnelle, reste lisible jusque dans l’aspect de cette production aux textures convoquant les attentions de l’érosion. Parmi la plus immatérielle des forces en présence, la lumière caresse tout avec volupté.

 

Lucien Petit est sculpteur. Son élan exige à tout niveau des talents d’acrobate. S’aventurant entre le mécanique et le sensible, sa création atteint aujourd’hui un moment-clé, dont la monographie « Le geste sur pied » tient à exposer la substance. Cinq années de recherches signent déjà une étape, inscrite par l’installation de sa nouvelle fabrique à Boisbelle fin 2014. De bilans en perspectives, l’événement marque un pivot. L’artiste construira prochainement son propre four, lui permettant déjà d’envisager des pièces de plus grande taille. Des superlatifs s’annoncent. Une souplesse s’affirme. Des socles trônent. Le mouvement circule. Ses confidences évoquent défis et incertitudes, puissance et vulnérabilité. Toujours cette pondération, manifeste, à entretenir. Alors les humeurs balancent, harmonisant vides et pleins, consolidant l’équilibre primordial entre rectitude et sensualité

Joël Riff
Mai 2020

EXPOSITION COLLECTIVE
C14-Paris Salon de Céramique Contemporaine

Eukéni Callejo, Cyril Chartier-Poyet, Charlotte Coquen, Christine Coste, Patrick Crulis, Nicolas Fédorenko, Annie Fourmanoir, Myung-Joo Kim, Alice Lothon, Thibaut Renoulet

Le Centre Céramique Contemporaine La Borne accueille l’association C14-PARIS en ses murs et l’invite à présenter quelques-uns et quelques-unes des artistes qui se sont illustrés par la qualité et l’originalité de leur démarche créatrice, à l’occasion des éditions du Salon C14-Paris, au cours des dernières années. Le salon C14-PARIS présente une céramique sculpturale dans son acception la plus large, du volume à l’installation mix-média, et se définit comme un salon d’art contemporain. La céramique, du fait des complexités structurelles qui lui sont propres (porcelaine, faïence, grès… terre crue, engobée, émaillée ou peinte à l’acrylique…, modes de cuisson très diversifiés) – offre une très large pluralité d’approches plastiques. Certains des artistes ici présentés ont été primés, d’autres non, mais tous incarnent une voie forte et prometteuse, qui dessine de façon captivante l’avenir de cet art de la matière que nul ne parvient à situer tant il transcende les clivages de l’art et tant il touche simultanément à l’intime, à la reconstruction de soi et à l’universel. Volontairement intergénérationnel et d’horizons géographiques de plus en plus larges, l’association C14-PARIS présente ici l’exigence et l’audace d’un art contemporain complexe et protéiforme.

PERMANENCE ARTISTIQUE
Association Céramique La Borne

Cette expositions est conçue par les membres de l’Association Céramique La Borne (ACLB) en écho au programme d’expositions temporaires. Tout au long de l’année, découvrez la diversité des pratiques artistiques traditionnelles ou contemporaines, sculpturales ou utilitaires des membres de l’ACLB.

Les artistes :

Céline ALFROID-NICOLAS, Éric ASTOUL, Jean-Luc BELLEVILLE, Françoise BLAIN, Laurence BLASCO MAURIAUCOURT, Jeltje BORNMAN, Patricia CALAS-DUFOUR , Fabienne CLAESEN, Dominique COENEN, Isabelle CŒUR, Nicole CRESTOU, Suzanne DAIGELER, DALLOUN , Stéphane DAMPIERRE , Bernard DAVID, Corinne DECOUX, Ophélie DEERELY, Rachid DJABELA, Claude GAGET, Agnès GALVAO, Dominique GARET, Laurent GAUTIER, Geneviève GAY, Pep GOMEZ, Frans GREGOOR, Catherine GRIFFATON, Jean GUILLAUME, Claudie GUILLAUME -CHARNAUX, Viola HERING, Roz HERRIN, Svein HJORTH-JENSEN, Jean JACQUINOT, Pierre JAGGI, Anne-Marie KELECOM, LABBRIGITTE, Daniel LACROIX, Jacques LAROUSSINIE, Dominique LEGROS, Christine LIMOSINO-FAVRETO, Claire LINARD, Guillaume M0REAU, Machiko HAGIWARA, François MARECHAL, Joel MAROT, Elisabeth MEUNIER, Maya MICENMACHER-ROUSSEAU, Francine MICHEL, Isabelle Marylène MILLERIOUX, Isabelle PAMMACHIUS, Nadia PASQUER, Christine PEDLEY, Lucien PETIT, Jean-Luc PINCON, Charlotte POULSEN, Françoise QUINEY, Michèle RAYMOND, Anne REVERDY, Sylvie RIGAL, ROCHINA Alicia, Lulu ROZAY, Hervé ROUSSEAU, Nicolas ROUSSEAU, Karina SCHNEIDERS, Georges SYBESMA, Diane TRUTI, Jean-Pol URBAIN, Nirdosh Petra VAN HEESBEEN, Claude VOISIN, David WITHEHEAD, Seungho YANG.

Expositions du 28 novembre au 3 janvier

Samedi 28 novembre :
17h : présentation du travail des artistes – Sur réservation
De 18h00 à 21h : vernissage 

Ouverture tous les jours sauf 25 décembre et 1er janvier de 11h à 18h